Trauma Bonding : Tu Me Fais Mal Mais J’ai Besoin De Toi

Les relations affectives captives abondent dans lesquelles l’amour blesse et anéantit le bonheur et l’estime de soi. Cependant, malgré cette situation, la personne est incapable de rompre ce lien, car l’affection et l’attirance sont aveuglantes, au point de minimiser les dégâts. Le trauma bonding dessine un canevas psychologique très similaire à celui du syndrome de Stockholm.
Il est possible que, vu de l’extérieur, ce type de situation nous paraisse étrange et contradictoire. Pourquoi en vient-on à tolérer l’intolérable ? Pourquoi continuer avec quelqu’un qui humilie, maltraite et abuse émotionnellement de l’autre ? La vérité est que dans le domaine des relations humaines, il y a des processus psychologiques enfouis qui doivent être compris.
En premier lieu, il est inutile de dire à quelqu’un qui se trouve dans cette situation de s’éloigner au plus vite de cette personne. La codépendance peut être si intense que l’esprit cesse de fonctionner rationnellement : ce sont les émotions et l’attachement malsain qui contrôlent complètement ce lien. C’est un lien qui corrompt, mais qui continue d’alimenter des besoins aussi élémentaires que la peur de l’abandon.

Qu’est-ce que le lien traumatique ?
C’est dans les années 1980 que l’idée du lien traumatique a été explorée pour la première fois. Ce sont les psychologues Donald G. Dutton et Susan L. Painter qui ont analysé les cas de centaines de femmes battues qui vivaient avec leur partenaire. La première chose qu’ils ont découverte est que parfois la peur n’est pas ce mécanisme qui, dans des situations normales, favoriserait la fuite ou la confrontation vers ce qui fait mal.
Ce qui se voit dans ce type de lien, c’est de la soumission et une nette différence de puissance. Il y en a un qui se soumet à l’autre. Nous avons des figures attachées à une affection folle à laquelle elles ne réagissent pas. Quelle est la raison de cette permissivité et de cette tolérance de la souffrance ? En réalité, ces relations suivent un schéma circulaire qui va du « maintenant je te donne de l’affection, maintenant je te maltraite, tu te mets en colère, tu me pardonnes et puis tout recommence ».
Le problème d’attachement et la personnalité narcissique
Les psychologues Donald Dutton et Susan Painter ont mené une étude dans les années 1990 pour mieux comprendre ce type de relation. Ils ont pu démontrer que bon nombre de ces femmes qui tentaient de quitter leur partenaire violent n’y parvenaient pas parce qu’elles manifestaient un type d’attachement émotionnel très intense. À cela s’ajoutaient la faible estime de soi et la personnalité dominatrice de l’agresseur.
De plus, une grande partie du lien dû au traumatisme s’établit avec un profil narcissique. Comme nous le savons bien, ces personnages sont habiles à manipuler, contrôler et vider leurs victimes de toute résistance psychologique et émotionnelle.
Le cycle de l’abus et de la dépendance à l’affection qui détruit
Un facteur incontestable s’ajoute au schéma émotionnel, cognitif et comportemental de la personne qui met en évidence le lien dû au traumatisme : sa propre dépendance à cet amour fou. C’est un type d’attachement qui tolère tout. La codépendance est constituée par une faible estime de soi, l’idéalisation de l’autre, la peur de la solitude et le sacrifice de soi envers le narcissique.
De même, pour que le lien dû au traumatisme soit maintenu, comme nous l’avons souligné précédemment, il existe souvent un cycle très particulier de maltraitance. Suivez les directives ci-dessous :
- La relation accumule les tensions (disputes, abus, humiliations, affronts…).
- Enfin, la victime réagit à un incident plus grave.
- L’agresseur agit rapidement en modifiant son comportement, en montrant de l’affection, du repentir et en exprimant sa volonté de changer.
- La réconciliation se produit et, en moyenne, est intense et enrichissante. Il laisse place à une brève période d’apparente harmonie.
- Les abus et les mauvais traitements réapparaissent et le cycle recommence.

Comment agir dans ces situations ?
Quelque chose d’important que nous devons comprendre à propos du lien traumatique est qu’il se répercute sur le déséquilibre de pouvoir dans lequel les périodes de punition se produisent avec des moments de récompense (comme les réconciliations). Il est décisif que la personne soit capable de briser ce schéma. Cela peut être difficile car souvent ces victimes sont complètement isolées.
Les narcissiques ont tendance à séparer leurs victimes de leur famille et de leurs amis, c’est pourquoi il leur est toujours difficile de se dissocier complètement de ceux qui les ont blessés. Le soutien social est essentiel dans ces cas. L’environnement, les collègues, les voisins et les services sociaux doivent être ces acteurs attentifs et sensibles à ces réalités.
Clés pour laisser derrière soi un lien traumatique
Pour affronter et sortir du lien traumatique, les stratégies suivantes seraient utiles :
- Séparation de la victime de l’agresseur.
- La victime doit reconnaître et prendre conscience de l’abus émotionnel, de la maltraitance, de la codépendance et de cet attachement malsain qui adhère à un lien nuisible.
- Développement d’un réseau de soutien. La personne doit avoir de nouvelles figures vers lesquelles se tourner pour parler, partager, se sentir validée et aidée. Cette proximité avec d’autres figures que l’agresseur leur permettra de voir leur réalité différemment pour se sentir plus fort, pour se fixer de nouveaux objectifs à l’horizon.
- La thérapie psychologique dans ces cas est essentielle pour traiter la blessure traumatique et reconstruire l’identité et l’estime de soi, ainsi que pour donner à la personne des stratégies afin qu’elle ne retombe pas dans des relations émotionnellement abusives.
Pour conclure, souvent le fait qu’une personne ait plus tendance à développer ce type de liens affectifs trouve son origine dans l’enfance et dans le type d’éducation qu’elle a reçue.
Le travail psychologique dans ces cas doit être plus profond et plus délicat pour guérir les marques d’un traumatisme qui persiste et se manifeste constamment à chaque connexion. Ce sont sans aucun doute des réalités très complexes.