Les Gens Ne Croient Plus à La Perfection, Ils Préfèrent L’honnêteté

Le boom des photos Instagram idéales, de l’idéalisation à outrance, de l’absurdité de montrer ce qui ne l’est pas, semble avoir ses jours comptés. Un nouveau mouvement social et publicitaire émerge où l’honnêteté prime, l’authenticité des faits, qu’ils soient agréables ou désagréables. La société commence à accepter les différentes réalités que nous vivons, quelle que soit la valence émotionnelle qu’elles génèrent.
La communication par des moyens technologiques a produit des changements dans la société, en particulier chez les nouvelles générations qui vivent adaptées au nouvel environnement. Le téléphone est chaque jour un compagnon plus fidèle en termes de compagnie et, du fait des abus, moins en intérêt. Ainsi, on peut parler d’un mode de vie conditionné par ce dispositif.
Dans les relations sociales d’aujourd’hui, il y a une nouvelle composante, une perfection exceptionnelle ou à peine réelle, possible grâce à des conditions ou à des manipulations bien précises. D’autre part, il semble que toutes les situations qui se déversent sur les réseaux sociaux sont positives et enrichissantes, lorsque nous savons de notre propre expérience et par procuration que le contenu que nous recevons est manipulé, altéré au service de la promotion et/ou de la publicité.
Les nouvelles générations imitent ce qu’elles voient, tout comme les précédentes, d’où l’excès de temps investi à vouloir montrer et apparaître dans un état de bonheur difficile à atteindre ou à maintenir. Les relations sociales sont passées de ce que nous voyions à ce que nous imaginions, elles ont perdu de la réalité et gagné en distance et en intermédiaire. L’immédiat a remporté le match sur le près, voire le physique.

L’écrivain britannique Matt Haig dans son dernier ouvrage, Notes on a Stressed Planet, aborde les dangers de ce monde moderne excessivement hyper-connecté. Certaines de ses critiques les plus acerbes visent précisément les réseaux sociaux.
Il a choisi de se désengager parce qu’ils généraient de l’anxiété et nécessitaient son attention pratiquement 24 heures sur 24. “J’ai passé beaucoup de temps sur Twitter, Facebook et Instagram et j’en suis venu à la conclusion qu’ils ne sont pas bons du tout. Ils ne sont bons ni pour notre politique ni pour notre psychologie.
Bien qu’il inclue tous les réseaux dans le même sac, ses fléchettes d’avertissement ne sont pas lancées de la même manière. Avec Twitter, par exemple, il est devenu tendu et énervé assez facilement. Sur Instagram, en revanche, sa vie a pris un autre sens, et pas très positif : “Ça m’a fait sentir que j’étais inférieur, même avec les versions que je publiais de moi-même.”
Pneus de perfection, l’honnêteté libère
L’intégrité c’est dire la vérité à soi-même, l’honnêteté c’est dire la vérité aux autres. Si nous sommes droits et honnêtes, nous reconnaîtrons qu’il y a dans nos réseaux sociaux un excès de désirabilité sociale qui se nourrit d’une perfection qui nous lie et nous trompe.
Fred Allen a dit que la publicité c’est 85% de confusion et 15% de commission. Maintenant que 100% se retrouve dans chaque réseau social, avec les supposés influenceurs qui ne sont plus que des marques masquées.
Il est normal de vouloir reproduire visuellement et esthétiquement ce qui nous est continuellement montré, mais le problème vient quand on privilégie systématiquement l’intérêt de notre marque à l’honnêteté.

Mahatma Gandhi a dit que croire en quelque chose et ne pas le vivre est malhonnête. La même chose se produit, de manière inversée, avec les réseaux sociaux et la perfection absolue et inaccessible qu’ils projettent. La même chose se produit lorsque nous sommes tentés de manipuler le récit de ce qui s’est réellement passé pour obtenir l’approbation numérique. Quand enfin, on biaise, cache ou rajoute, repoussant l’honnêteté…
Aussi, au fond de nous, nous pouvons soupçonner la manipulation ou le mensonge des autres, en même temps que nous voulons penser que ce qu’ils montrent ou racontent s’est produit ; si c’est le cas, le témoignage est en quelque sorte la preuve que c’est possible.
Face à cela, l’espoir est en train de naître. Or, il semble que le mouvement publicitaire commence à s’inverser, non pas parce qu’internet et la publicité ne vont pas de pair, mais parce que ce qui commence à se vendre, c’est l’honnêteté la plus grossière et la plus insurmontable.